Au fil du fleuve

Parfois, dans la nuit, une étoile brille au bout de la corne du rhinocéros de l'Inde. Seule alors, une balle en or est capable de le tuer. Toute sa vie, sans même qu'il le sache, Jakez Le Moal s'est préparé à cette traque qui devait le révéler à lui-même. Mais que d'épreuves à surmonter, avant de pouvoir l'entreprendre ! Il est successivement mousse à bord du morutier paternel, matelot en Cochinchine à l'époque de la conquête ; il suit Francis Garnier dans son exploration du Mékong, puis participe à ses côtés à sa fulgurante et tragique aventure tonkinoise : la disparition du maître qu'il s'est donné, le transforme en révolté. La forêt, la plus belle, celle des tecks du Haut-Laos, où il vit en solitaire pendant de longues années, apaise son âme tourmentée. Il finit même par y trouver le bonheur. Le Moal est-il marqué par le sort ? Garnier avait été massacré sous ses yeux ; sa femme laotienne meurt en mettant au monde son enfant. Il n'est plus qu'un homme usé qui se débat dans une aventure dégradante, et totalement au-dessus de ses moyens. – Pour t'en sortir, lui dit un ami, une seule solution : repartir en brousse, pister un rhinocéros, le tuer et vendre sa corne. Elle vaut son poids d'or. Quelque part en Birmanie, le rhinocéros auquel son sort est lié de toute éternité, s'est mis en marche vers le Laos. Lui-même va à sa rencontre dans le chaos des montagnes du pays Lu. De jour en jour, toutefois, son envie de tuer diminue. Au gré de son épuisement, il découvre qu'en se rapprochant de son gibier, il va au-devant de lui-même. Que sera la rencontre dans l'Indochine mystérieuse et fascinante de la fin du XIXe siècle ?